Un contact avec une nouvelle culture, c’est toujours quelque chose de marquant. Un PREMIER contact avec une nouvelle culture doublé d’un premier voyage, ça a le pouvoir de te transformer à tout jamais!
Pour moi, tout s’est enclenché lorsque ma mère à décidé qu’on partait m’acheter une petite valise pour mon premier voyage officiel. C’est là que, du haut de mes petits dix ans, je suis partie vivre avec ma mère dans une famille cubaine pour une semaine. N’ayant jamais été en contact avec d’autres cultures, attendant l’avion à l’aéroport Pierre-Elliot-Trudeau, je n’avais qu’un sentiment d’excitation dans le cœur. Valise à la main, je suis débarquée de l’avion quatre heures plus tard à La Havane. C’était la première fois de mon existence que je sentais cette chaleur humide qui se déposait sur ma peau.
Cochons et poules qui courent entre mes jambes, rendez-vous à la grande table familiale le soir pour manger et apprendre à connaître ces gens qui semblent avoir un si grand cœur. C’est tous ensemble, avec les étoiles dans les yeux, que nous avons partagé un repas cubain typique : poulet, riz et churros pour dessert.
Pour une meilleure compréhension de la culture locale, on te recommande le guide Comprendre Cuba.
La pauvreté, une richesse paradoxale?
Premier contact avec des personnes ayant si peu de biens matériels, mais autant de générosité à offrir. Le soir, couchée sur un petit matelas si mince, je réalise combien je suis choyée d’être née au Québec et j’oublie mon mal de dos. Le lendemain, on part en excursion pour aller voir des chutes. Je ne me souviens pas bien des chutes, mais le chemin pour s’y rendre est imprégné dans mon esprit. Maisons de tôle, chiens errants, enfants squelettiques qui courent derrière le camion pour qu’on leur donne à manger en criant des mots dont j’ignorais le sens.
Voir la pauvreté pour la première fois, c’est difficile, c’est comme un harakiri, ça déchire, ça tord, ça retourne le ventre. Aujourd’hui, je remercie ma mère de m’avoir ouvert les yeux sur cette douloureuse réalité grâce à ce voyage. J’ai par la suite longtemps cultivé un grand besoin de comprendre et de voir les différentes réalités des êtres qui vivent sur notre planète. Dans ce sens, c’est cette découverte qui a semé en moi la graine de la relation d’aide.

Bye bye, le confort!
À vingt ans, je me suis rendue seule acheter mon premier sac à dos de voyage. J’ai dit «Bye» à ma mère qui pleurait à l’aéroport Montréal-Trudeau et je suis partie en Thaïlande rejoindre des amis pour un vrai voyage backpack. Enfin, je quittais ce Québec chaud et douillet, trop confortable à mon goût. Seule contre le monde, je ne savais pas que ce que je trouverais là-bas; c’était en fait un tsunami de prises de conscience.
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Entre deux bouffées de vapeur d’essence omniprésente dans l’air de Bangkok, je regardais la ville, assise dans mon tuk-tuk. Je n’avais jamais vu autant de gens réunis dans des ruelles. Chaotique spectacle.
Je suis partie à la découverte de ce pays, du nord au sud, et j’y ai rencontré des gens qui ont une sagesse inouïe. Je suis tombée malade dans les montages et des habitants d’un petit village de la jungle m’ont accueillie chez eux comme si j’étais l’une des leurs. Ils ont chassé les chiens sauvages du parquet et m’ont installé là pour la journée. Couchée dans les poils de chiens, sans doute attaquée par les puces, j’ai remercié la vie d’avoir rencontré des gens si altruistes, puis je me suis demandée si, au Québec, une famille d’inconnus m’aurait offert un lit dans sa maison comme celle-ci l’a fait avec si peu d’hésitation.
Ce voyage m’a fait réaliser que le cadre imposé par notre société occidentale n’est qu’un cadre imaginaire. Que les conventions sociales ne sont que frontières. Qu’il y a plusieurs façons de voir la vie, l’amour, le respect, différentes façons de lire un livre, de gauche à droite ou de droite à gauche. Bref, différentes façons d’aider les autres.
Pour mieux discerner les différences culturelles d’un pays comme la Thaïlande, on te suggère le guide Comprendre la Thaïlande.
Lost in translation
Le retour au Canada a été difficile, mais ne s’est pas éternisé et je suis rapidement repartie pour un voyage de trois mois en Amérique du Sud. J’ai atterri au Chili, pays froid en hiver, mais ô combien chaleureux en valeurs. Des villes aux maisons multicolores aux villages de pêcheurs, j’ai parcouru les histoires des gens jusqu’en Bolivie. Là-bas, alors que j’étais assise à la gare d’autobus, une vieille dame bolivienne en habit traditionnel s’est approchée de moi et m’a adressé un sourire qui ne laissait entrevoir aucune dent restante. Elle s’est assise et m’a montré sa bible, puis elle m’a demandé si nous la lisions, au Canada. Je lui ai répondu que certaines personnes le font et d’autres non. C’était difficile pour elle de comprendre pourquoi.

J’ai terminé ce périple par un mois au Pérou, pendant lequel j’ai vécu chez une famille péruvienne. Je devais me rendre chaque jour à l’école du coin pour exécuter un stage de bénévolat. Chaque matin, je marchais jusqu’à la grande route et je balançais ma main de haut en bas. Contrairement au Québec, ce geste signifie une demande d’arrêt, dirigée vers le petit autobus qui compte sept places, mais où il y a en réalité onze personnes empilées les unes sur les autres.
Durant ce mois, j’ai aidé des enfants à apprendre un peu l’anglais, seul espoir pour eux s’ils souhaitent travailler dans les grandes villes plus tard. J’en profitais pour apprendre l’espagnol jour après jour. Les enfants étaient patients; on se comprenait souvent en faisant des gestes, quand les mots me manquaient.
Prise de conscience
Puis, j’ai découvert les petits plaisirs de la vie, comme faire des bulles au moment du lavage de mains et construire des gigantesques châteaux avec de vieilles boîtes de lait. Voyant qu’ils ne mangeaient que trois bols de riz au thon par jour, j’essayais de réunir tous les pesos trainant au fond de mes poches pour leurs acheter des fruits et des légumes. Je vidais mes poches, mais je remplissais mon cœur. Gorgée de compassion, j’oscillais entre l’empathie et la sympathie. Sur le chemin du retour, dans l’autobus trop rempli, j’imaginais souvent un Noël québécois où les cadeaux pleuvent souvent à profusion dans le salon et je me sentais coupable. C’est alors que je me suis promise de vivre différemment à mon retour et d’aider les gens en difficulté au Québec.
En effet, je pense que la personne qui n’a pas conscience de tout ce qui se passe dans le monde, comme la famine ou la guerre, par exemple, et qui vit sa vie sans se soucier de ce qui se déroule autour d’elle a une vie en apparence «plus facile». Avoir conscience de ces choses m’a rendue tout à coup responsable. Une fois que l’on sait certaines choses, c’est notre vie tout entière qui est chamboulée, c’est même le sens de la vie tout entier qui change.
Une quête perpétuelle
Toujours pas rassasiée de ma quête, je suis partie à la rencontre de l’Asie pour une deuxième fois. Une fois arrivée au Vietnam, après trente heures d’avion, j’avais déjà soif d’en apprendre plus sur cette guerre folle de 1954. Difficile à démystifier toute seule, j’ai donc pris une visite guidée avec l’unique guide vietnamien francophone du coin à avoir vécu la guerre. C’est en se promenant dans les tunnels de la zone démilitarisée que le guide nous a raconté son histoire : il y est resté caché avec sa famille, collés les uns sur les autres dans le froid, durant plus de trois jours. Il pleuvait des bombes sur leurs têtes et sa femme et lui priaient les dieux pour qu’elles ne tombent pas sur l’un de leurs enfants.

Prochaine destination : Cambodge, direction village reculé pour aller faire du bénévolat dans un petit centre communautaire. Arrivée dans la maison où je serais logée, j’ai été accueillie chaleureusement par les enfants du village. Ayant comme voisine une grosse vache attachée à une corde, j’ai vécu la vie de paysan pour une semaine, à donner des cours d’anglais au petits Cambodgiens, qui avaient encore une fois l’anglais pour seul passeport vers la vie urbaine.
Donner un sens au voyage
C’est après la découverte de douze pays que j’ai commencé à donner un sens à cette quête, un sens à ma vie. J’avais besoin de voir le monde et d’en connaître ses souffrances pour trouver ma place dans notre société si droite et parfois un peu trop individualiste à mon goût. J’avais besoin d’entendre les histoires des gens, de voir des réalités différentes des miennes pour choisir quel genre de métier je voulais faire au Québec.
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Quand je pense à tous mes périples, je suis instantanément heureuse de tout ce que mes yeux ont pu voir, de tout ce que j’ai appris durant ces quatre années… et je suis encore plus avide de voyager. Je veux chaque jour me coucher en ayant appris une nouvelle chose et en étant une meilleure personne. Je suis encore plus convaincue que le savoir permet d’agir.

Ce qui m’a amenée à étudier en relation d’aide, c’est ma découverte du monde dans lequel on vit. J’ai décidé que le seul moyen de vivre avec tout ce que j’avais vu, ce serait de faire le bien autour de moi. Je veux utiliser ma vie pour contribuer à changer les choses ou, du moins, à les améliorer. Je vis dans un Québec où j’ai le droit d’être une activiste, c’est de mon devoir d’y apporter ma couleur. Comme Gandhi l’a si bien dit : « Sois le changement que tu veux voir dans le monde.»
Joli récit 🙂
Je m’y retrouve un peu. Après quelques années de voyages en mode backpacker mais “classique” (hostel etc.) au Pérou, Bolivie, Inde… cela n’a qu’augmenté ma soif de découverte mais surtout du monde et de ces habitants. C’est pourquoi je viens de me lancer dans un tour du monde sans retour, sans avion, en autostop et hébergé chez l’habitant au maximum (volontariat ou couchsurfing), pour rencontrer les gens et comprendre leurs vies 🙂
Oh wow! Quel beau plan Jul, profite s’en un tour du monde c’est tout un grand projet! Vie chaque seconde et imprègne toi de chaque rencontre!
Carolanne
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